Par Julia Itel – Publié le 06/06/2023
Athanase d’Alexandrie (296-373), également connu sous le nom de saint Athanase, est l’un des Pères de l’Église les plus importants du IVe siècle. Athanase est surtout connu pour son rôle dans la défense de l'orthodoxie chrétienne, pour sa lutte contre l'arianisme et pour être l'auteur de la célèbre Vie d’Antoine qui a aidé à diffuser le monachisme hors d'Orient.
Qui est Athanase d'Alexandrie ?
Peu de choses sont connues de l'enfance et de la jeunesse d’Athanase car rares sont les sources historiques concernant cette période de sa vie. On sait toutefois qu'il a reçu une éducation classique à Alexandrie qui est, au IVe siècle, toujours un centre intellectuel de premier plan, notamment dans l'étude biblique.
À un jeune âge, Athanase devient proche de l'évêque d'Alexandrie, Alexandre, qui le baptise et le nomme diacre. Il devient son secrétaire et son conseiller.
Athanase, défenseur de l'orthodoxie chrétienne
Arius et l’arianisme
Arius (vers 250-336) est un prêtre de l'une des églises d'Alexandrie. Il est donc placé sous l'autorité de l'évêque Alexandre. Arius est surtout connu pour avoir initié la controverse arienne, qui a eu des répercussions majeures sur le développement du christianisme primitif. Arius et par conséquent sa doctrine, l'arianisme, s'opposent au concept de consubstantialité, défendue par Alexandre, qui tend à accentuer selon lui l'idée d'une égalité entre Dieu, le Père et Jésus-Christ, le Fils. L'arianisme questionne donc la nature de la divinité du Christ et considère le Fils comme une créature divine engendrée par le Père. Ainsi, le Fils ne partagerait pas, selon Arius, la même essence que le Père. Dès lors, la conception du salut diffère. D'après l'historien James Papandrea (Reading the Early Church Fathers, 2012), la christologie arienne est une christologie ascendante au sein de laquelle Jésus-Christ est un homme qui devient Dieu. Alors que dans la christologie orthodoxe, Jésus-Christ est le Verbe divin devenu humain, apportant avec lui le salut.
Le concile de Nicée
Alors que l'arianisme se répand dans tout l'Empire d’Orient et qu'il soulève de nombreuses polémiques et tensions au sein du christianisme, l'empereur Constantin, inquiet pour l'unité de l'empire, convoque la tenue du premier concile œcuménique en 325 afin de traiter les controverses théologiques qui divisent l'Église. Le concile rassemble plus de 300 évêques venus de tout l'Empire débattre de la question de la divinité du Christ.
Pour en savoir plus, visionnez « Le concile de Nicée et l’arianisme »
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Non sans difficulté, les évêques adoptent finalement ce qui a été appelé le Symbole ou le Credo de Nicée. Cet élément central de la théologie chrétienne promulgue la doctrine trinitaire, basée sur le concept grec de homoousios (« de la même essence ») : le Fils est « engendré, non créé, de même nature que le Père ». L'adoption du Credo de Nicée permet à l'Église de condamner l'arianisme comme une hérésie et d'excommunier tous ceux ne voulant pas le ratifier.
En tant que conseiller de l'évêque Alexandre, Athanase joue un rôle-clé dans le concile de Nicée puisque c'est à l’évêque, aux premières loges de la lutte contre l’hérésie arienne, d’ouvrir le débat. On lui doit notamment le terme « consubstantiel ».
Athanase, Évêque d'Alexandrie et la lutte contre les ariens
À la mort d’Alexandre, Athanase est élu évêque d'Alexandrie en 327. Il a environ 31 ans. Dans son diocèse, il travaille avec détermination à instaurer durablement la foi nicéenne qu’il a tant défendue. Mais il va se heurter de longues années aux arianisants. Pour défendre le Credo, Athanase écris donc plusieurs ouvrages : entre autres, Trois discours contre les ariens, Apologie contre les ariens et Histoire des ariens.
Athanase l’exilé
Athanase reste le patriarche d'Alexandrie pendant 45 ans. Mais il va passer plus de 17 ans en exil. Quelques années après le concile qui a donc excommunié Arius, l'empereur somme Athanase de réintégrer l’hérésiarque au sein du clergé d'Alexandrie, ce que le nouvel évêque refuse. Les ariens et semi-ariens sont, par la suite, souvent soutenus par les empereurs et tentent à plusieurs reprises d'expulser Athanase d’Alexandrie. En effet, Eusèbe de Nicomédie, un partisan arien, est réhabilité comme conseiller ecclésiastique de Constantin et souhaite faire tomber Athanase. Il organise ainsi un synode attire en 335 qui oblige l'empereur à envoyer Athanase en exil à Trèves, de 335 à 337. Lorsque Constantin meurt, après avoir été baptisé par Eusèbe, ses trois fils se partagent l'Empire. Son fils aîné Constantin II, à qui revient le Bas-Empire, éprouve de la sympathie pour le patriarche d’Alexandrie et l’aide à rentrer en Égypte. Mais son frère cadet, Constance II, pro-arien et régnant sur l’Égypte ne l’entend pas de cette façon. Athanase est alors de nouveau envoyé en exil à Rome, auprès du pape Jules. Il y reste six ans.
À voir « Constantin, premier empereur chrétien »
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En 346, les Égyptiens plaident pour le retour d’Athanase auprès de Constance II. L'évêque peut compter sur le soutien des moines qui partagent avec lui l’adhésion à la profession de foi nicéenne. Athanase revient donc en Égypte. À la mort de Constantin II, Constance II devient le seul empereur à régner sur tout le Bas-Empire. Il voit là une chance d'imposer l'arianisme et d'écraser le prestige d'Athanase. En février 356, l'empereur envoie ses troupes arrêter l'évêque dans la cathédrale d'Alexandrie. Mais plusieurs membres du clergé l'aident à s'échapper. Athanase fuit au désert parmi les moines qui l’hébergent et l'aident pendant six ans à se cacher des autorités. C'est là qu'il rédige la Vie d'Antoine.
La Vie d’Antoine
Le monachisme égyptien
Avant même de trouver refuge auprès d'eux, Athanase fréquente et apprécie la compagnie des moines. Depuis le IIIe siècle, De nombreux chrétiens fuyant les persécutions se sont retirés dans le désert et y mènent une existence rudimentaire, ascétique. C'est là que se développe le monachisme, d'abord dans sa forme anachorétique (vie d’ermite, donc isolée du monde) puis cénobitique (où les moines vivent en communauté). L'essor du monachisme en Égypte et souvent associé à la figure de saint Antoine, considéré comme son fondateur.
L’Égypte, berceau du monachisme
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Antoine le Grand
Antoine (251-456) est un propriétaire terrien aisé de la Haute-Égypte qui, à 20 ans, est bouleversé par la lecture de l'Évangile. Il vend ses biens et lègue sa richesse aux pauvres puis, il se retire dans le désert pour mener une vie de prière et d’ascèse. Sa renommée se répand et, bientôt, Antoine alterne entre l’érémitisme et l’enseignement auprès de ses disciples qui commencent à affluer. Selon lui, seul le renoncement au monde est la vie de piété permettent d'atteindre le salut. La voie acétique d’Antoine a ensuite incité de nombreux chrétiens à établir des communautés monastiques en Égypte.
Athanase à la rencontre de saint Antoine
À la mort d’Antoine, Athanase qui l'a connu, recueille de nombreux témoignages et s’attelle à écrire sa biographie. Le livre rencontre rapidement du succès, est traduit dans plusieurs langues (latin, arménien, copte, éthiopien, syriaque) et se diffuse dans tout l'Empire. C'est l'un des textes les plus influents du christianisme et certainement l'ouvrage le plus connu et le plus lu d’Athanase.
Il érige Antoine en figure spirituelle et raconte la lutte qu'il a menée, loin du monde, contre les démons. Il relate également certains de ses enseignements et de ses miracles, qui ont suscité une grande admiration parmi les chrétiens de son temps. Athanase souligne enfin l'importance du modèle d’Antoine et encourage ses lecteurs à suivre son exemple.
La Vie d’Antoine est le premier ouvrage hagiographique chrétien (l’hagiographie est un genre littéraire racontant la vie d’un saint en le présentant comme un modèle de référence et exemplaire). Ce récit a aidé à populariser le monachisme et à propager la spiritualité acétique dans le christianisme.
Athanase, Père et Docteur de l’Église
Après plusieurs péripéties et deux exils supplémentaires, Athanase s'éteint le 2 mai 373. Il est donc fêté chaque 2 mai par les catholiques. L'évêque d'Alexandrie est proclamé Docteur de l'Église en 1568 par le pape Pie V.
Traditionnellement, l'iconographie chrétienne représente Athanase vêtu de ses habits épiscopaux, portant la tonsure et la barbe (ce qui est caractéristique des moines) Ainsi qu'un livre ou un parchemin, soulignant son double rôle de défenseur de l’orthodoxie chrétienne et de promoteur de la doctrine trinitaire.